Le rat-taupe nu (ou glabre)
Originaire de l'Afrique de l'Est, il peut survivre environ 18
minutes sans oxygène.
Un article publié dans la revue Science (20.04.2017) et signé Kai Kupferschmidt, présente cette espèce comme les superhéros des animaux de laboratoire. Ils présentent peu de signes de vieillissement, ils sont résistant à quelques types de douleur et n'ont presque jamais de cancer. Mais la dernière découverte est que ces animaux peuvent survivre plus de 18 minutes sans oxygène. Comment y parviennent-ils ?
Chez les autres mammifères dont l'homme, les cellules
cérébrales commencent à mourir quelques minutes après le début de la privation d'oxygène. Le
rat-taupe nu dispose d'un mécanisme de secours : son corps est capable de changer de source d'énergie, une stratégie qui ouvre la voie à de nouvelles manières de combattre l"AVC et la crise cardiaque chez l'homme. Le Prof. Grant McClelland, de l'Université McMaster de Hamilton (Canada), spécialiste de physiologie comparée, considère que c'est un "fait exceptionnel pour un mammifère". Le rat-taupe nu est exceptionnellement résistant à l'air contenant de hauts niveaux de dioxyde de carbone ou peu d'oxygène. Ces animaux vivent en colonies pouvant aller jusqu'à 300 individus et occupent des trous souterrains où l'oxygène peut être très raréfié.
Pour déterminer de quel minimum d'oxygène le rat-taupe nu a besoin pour survivre, Thomas Park, un chercheur en neurosciences de l'Université de l'Illinois, à Chicago, et Gary Lewin, un biologiste spécialisé en physiologie du Centre Max Delbrück pour la médecine moléculaire (Berlin), ont placé des rats-taupes nus et des souris dans une pièce sans oxygène. Les souris sont mortes en moins d'une minute. Quant aux rats-taupes nus, leurs battements cardiaques ont ralenti de 200 à 50 par minutes et ils ont rapidement perdu connaissance. Mais même après avoir passé 18 minutes dans la pièce sans oxygène ils ont récupéré complètement quand on leur a fourni de l'air normal.
Le mécanisme peut être lié à la manière dont le rat-taupe nu métabolise le sucre. Les mammifères, dont l'homme, utilisent le glucose comme source d'énergie au cours d'un processus à plusieurs étapes appelé glycolyse. Ce processus exige de l'oxygène. Sans oxygène, des produits dérivés comme le lactate se développent, inhibant les premières étapes de la glycolyse, et la production d'énergie cesse. Les réserves d'énergie sont rapidement vidées, spécialement dans le cerveau, et les cellules commencent à périr.
Looking for chemical changes in the oxygen-deprived naked mole rats,
the researchers found sharply higher levels of two sugars in the blood,
fructose and sucrose (a molecule consisting of fructose and glucose).
And compared with other mammals, those mole rats also had higher levels
throughout the body of both GLUT5—a molecule that transports fructose
into cells—and an enzyme that converts fructose into a form that can
enter glycolysis. “Together this allows the naked mole rat to use
fructose as fuel instead of glucose when there is no oxygen,” Lewin
says.
Because fructose enters glycolysis at a later stage, energy
production can go on if no oxygen is present and the first steps of
glycolysis are blocked. According to McClelland, even fish or turtles
that can survive long periods without oxygen have not modified
glycolysis in that way. “It is a great example of evolution finding
different solutions for the same or similar environmental challenges,”
he says.
“I’m fascinated by this glucose-to-fructose switch,” says Rochelle
Buffenstein, a biologist at Calico, a research company in South San
Francisco, California, that former Google board member Arthur Levinson
founded to combat aging. Buffenstein has studied naked mole rats for
more than 30 years and says the animals still manage to surprise her.
Researchers should start to look whether other animals in low-oxygen
environments have evolved to use fructose that way, she says, adding,
“there’s a whole world of wonderful, crazy critters out there.”
Still, how important the switch to fructose is for the animals’
survival isn’t clear, cautions Göran Erik Nilsson, a comparative
physiologist at the University of Oslo. Other mechanisms such as slowing
down metabolism play a role, as does the mole rats’ unusually low body
temperature, a cool 30°C.
Better understanding the mole rat’s energy switchover will be key to
any hope of somehow using it to help humans. During a stroke or a heart
attack, for example, oxygen flow to the brain is interrupted and brain
cells begin to die within minutes, Park says. “If we could activate the
fructose pathway, we could significantly extend that time span,” he
predicts.
“I’m very excited by this paper,” Buffenstein says. “I’m looking forward to seeing what happens next.”
Survivre
au moins 5 heures
Les
végétaux comme le rat-taupe nu --apparemment le seul mammifère
doté de cette capacité-- ont un métabolisme capable de transformer
le fructose en énergie sans utiliser d'oxygène. "Ce rongeur a
tout simplement réorganisé son métabolisme pour le rendre tolérant
à un environnement ayant peu d'oxygène", a indiqué Thomas
Park, professeur de biologie à l'Université d'Illinois à Chicago,
qui étudie ces étranges créatures depuis près de deux décennies.
Avec
un faible niveau d'oxygène qui tuerait un humain en quelques
minutes, le rat-taupe nu peut survivre au moins cinq heures, a-t-il
précisé. Les humains ont besoin d'une atmosphère contenant au
moins 10% d'oxygène. L'air que nous respirons en contient
normalement 21%. En dessous de 10%, l'organisme ne peut générer
assez d'énergie pour assurer les fonctions vitales des cellules.
Dans
les mêmes conditions de privation d'oxygène, le rat-taupe nu voit
sa respiration et son rythme cardiaque se ralentir, puisant dans les
grandes quantités de fructose libérées dans son sang pour produire
de l'énergie jusqu'à ce que l'oxygène redevienne suffisant.
Selon
les scientifiques, comprendre la façon dont ce petit rongeur
d'Afrique de l'Est active ce processus biologique pourrait
éventuellement ouvrir la voie à de nouveaux traitements pour des
victimes de crise cardiaque ou d'accident vasculaire cérébral dont
l'organisme a été privé d'oxygène.
Un
animal mystérieux
La survie de 18 minutes sans oxygène n'a été suivie d'aucune séquelle.
Lors de l'expérience les rongeurs
ont cessé totalement de se mouvoir et leur rythme cardiaque
est passé de 200 à 50 pulsations à la minute. "Ils ont pu
survivre sans aucun dommage neurologique apparent", a précisé
Jane Reznick, une biologiste moléculaire du Centre Max Delbrück de
médecine moléculaire à Berlin, un des co-auteurs de la recherche.
Les
scientifiques ont également observé que ces animaux étaient
protégés contre un manque d'oxygène qui provoque une accumulation
de fluides dans les poumons dont souffrent les alpinistes à haute
altitude et qui peut être mortel. Ils estiment que ce métabolisme
unique est une adaptation à son habitat très peu oxygéné. Car, à
la différence des mammifères vivant en terriers, ce rongeur partage
des galeries souterraines peu ventilées avec une centaine de
congénères.
Les
souris ont une espérance de vie maximum de trois ans alors que le
plus vieux des rats-taupes connu est mort à 32 ans. Ces chercheurs
notent que le rat-taupe nu reste peu étudié comme animal modèle de
recherche. Les scientifiques ont ainsi découvert leur très grande
tolérance à la douleur en 2009 et achevé le séquençage de leur
génome seulement en 2011.
Ce
petit rongeur continue à être mystérieux: ces scientifiques n'ont
pas pu ainsi déterminer l'origine du fructose. Ces rongeurs vivent
en société, à l'instar des abeilles, dans des colonies
souterraines pouvant atteindre 300 membres où une reine donne
naissance à des enfants travailleurs.